Le réalisateur Nicolas Vanier et Patrick Timsit lundi dernier à Montclus. © Sylvie Cambon
L’équipe du film de Nicolas Vanier est installée pour trois mois dans le secteur. Les retombées sont nombreuses.
Depuis un mois, Nicolas Vanier déploie sa caravane sur différents sites de la vallée de la Cèze pour le tournage de son film Mon Ami Poly. Ce long métrage dont la sortie est prévue en décembre 2020 nécessite la mobilisation d’importants moyens logistiques et d’intendance. Le directeur de production Philippe Gautier gère les demandes artistiques et surtout la maîtrise des dépenses. Un tournage de film, ça coûte cher, ça fait marcher l’économie et ça donne du travail.
Emplois
À Montclus par exemple, la création des décors a nécessité la transformation des façades des maisons du village. Il a fallu créer une boucherie, une quincaillerie, une boutique et un café. Ce chantier a été conduit par des équipes de décorateurs du film épaulées par des gens du village embauchés pour l’occasion. Floraine, 23 ans, est montclusienne depuis peu. Elle a décroché un petit rôle de villageoise, spectatrice du cirque, après avoir été sélectionnée par l’agence Pôle emploi de Bagnols où se passait le recrutement. "J’ai été prise sur quatre jours pour huit à neuf heures de travail quotidien." Des figurants de tout le secteur ont été embauchés, des castings avaient eu lieu à Bagnols, Alès dans toutes les écoles de la vallée de la Cèze... Deux prescripteurs ont été recrutés pour assurer des cours de rattrapage scolaire des enfants engagés comme acteurs dans le film Mon Ami Poly. "Par exemple, la petite actrice qui tourne avec le poney a tous les jours une heure et demi à deux heures de cours par une prescriptrice qui est de Montclus." Une quinzaine d’enfants, figurants, doublures, silhouette ou acteurs bénéficient de ce régime.
De nombreux corps de métiers sollicités
De Bagnols à Goudargues, nombreux sont les autres corps de métiers sollicités par la ruche qu’entraîne un tournage de cette ampleur. "Ils louent des voitures, des camionnettes, des échafaudages. Les restaurants du coin travaillent, avec des tablées de vingt-cinq, trente personnes", énumère Éric Patin, qui, pour l’Agglo, s’occupe de l’interface avec la régie. Ils ont aussi besoin de pressing pour les costumes... Mais aussi de dentiste, médecin, masseur. "Beaucoup de métiers sont impactés."
Promotion et fragilités
L’économie de Mon Ami Poly, c’est aussi des retombées touristiques espérées pour la Vallée de la Cèze. Maire de Cornillon, Gérard Castor fait partie de l’équipe des figurants retenus par Nicolas Vanier. Il incarne un notable du village. Il a notamment côtoyé le comédien et humoriste Patrick Timsit. "C’est quelqu’un qui peut nous apporter énormément dans la promotion du tourisme, tout comme d’ailleurs des comédiens de la trempe de François Cluzet ou Julie Gayet." Mais on devra aussi à cet événement cinématographique d’avoir mis en lumière certaines fragilités de l’économie locale. "C’est une région sublime mais complexe, commente Philippe Gautier. Les infrastructures sont un peu limitées. Ce n’est pas du tout péjoratif. La plupart des hôtels étaient remplis les week-ends. Ce qui obligeait nos équipes à changer fréquemment de lieu d’hébergement." Le directeur de production comprend cette situation qui, estime-t-il, traduit le charme de la Vallée de la Cèze. "On est dans un environnement extrêmement protégé."
Hébergement
L’insuffisance de l’offre d’accueil hôtelier a évidemment profité aux maisons d’hôtes et aux gîtes qui ont été pris d’assaut par les équipes de tournage, des maisons aussi ont été louées pour deux voire trois mois. Pour l’équipe, un élément de contexte moins commode, "avec des collaborateurs dispersés aux quatre coins du territoire. C’est un peu plus compliqué pour les communications. ça rallonge les temps de parcours et nécessite des moyens de transport plus lourds".
Une ambiance enthousiasmante
Pour autant, conclut Philippe Gautier, "nous sommes ravis, tout se passe merveilleusement bien. Et les maires nous facilitent la tâche au maximum". "Nous, on les soigne, mais eux aussi !", dira de son côté Éric Patin. Quant aux habitants de la vallée, ils semblent très heureux de suivre de plus ou moins près cette aventure unique, le tournage restant accessible. "C’est génial, c’est super intéressant, s’exclame Giulia Ranzato, du camping Les Cascades de La Roque. Ils sont tous très sympas, humains, n’imposent pas leurs règles, souhaitent que tout le monde se sente impliqué. Il y a de beaux échanges, de l’entraide..."
Une saison précoce
En moyenne, une centaine de personnes travaillant sur le film vit dans le secteur depuis avril, et ce jusque fin juin (sans compter les séjours antérieurs pour la préparation). Elles sont hébergées, en mode dispersé donc, d’Issirac à Saint-André-d’Olérargues, de Saint-Michel-d’Euzet à Verfeuil et dans les communes où l’action se déroule ou qui servent de base logistique : Goudargues, Montclus, La Roque-sur-Cèze... Au plus près de certaines scènes du tournage, Guilia Ranzato, propriétaire du camping des Cascades et du restaurant du même nom à La Roque, confirme : "Pour nous, c’est une réelle retombée. De mars à fin juin, l’équipe nous loue une trentaine de locatifs (soit la moitié de la capacité du camping). C’est une période où nous sommes très dépendants de la météo. Et celle du mois de mai n’a pas poussé les gens à se déplacer. D’habitude, on ouvre autour du 10 avril, et il commence à y avoir vraiment du monde mi-juin." Même constat pour Karine Destrait, propriétaire de L’arbre d’or (25 couchages) à Saint-Michel-d’Euzet. Elle a d’abord reçu Nicolas Vanier et son équipe rapprochée "dès mars". En mai et juin, son gîte affichant complet les week-ends depuis longtemps pour d’autres groupes, elle accueille "les seconds rôles qui restent quelques jours, la semaine, ce qui vient compléter mon chiffre d’affaires des weekends". À Goudargues, où le maire loue pour une somme modique la salle capitulaire (QG pour les costumes notamment), la saison aussi a commencé avec une avance bienvenue pour les commerçants et restaurateurs.
Entre 2010 et 2013, l’ensemble des tournages en Languedoc-Roussillon (français et étrangers) avait généré en moyenne 6 millions d’euros par an de retombées économiques (source : Languedoc Roussillon Cinéma).
Article paru dans Midi Libre le 27 mai 2019
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